dimanche 27 avril 2008

One day, part II

II- Où l'on rencontre un héros pas super

Le Violonier était paresseux par nature. Il passait la majorité de son temps allongé sur les toits à faire danser les rats néomontpellierains en regardant les volutes de suie qui cachaient les étoiles depuis longtemps disparues. Il gagnait son pain avec ses airs, parfois mélodieux et apaisants, parfois discordants et destructeurs. Il y avait toujours quelqu'un pour payer un guérisseur ou un assassin, et dans les deux cas il était le meilleur de la ville. On ne le cherchait pas, non. Simplement, si quelqu'un avait besoin du Violonier, il parlait à un rat, enveloppait un bout de fromage avec les termes de son marché, et un peu plus tard il pouvait éventuellement recevoir la visite d'un musicien. Parfois on lui tendait des pièges, mais le dernier à avoir essayé avait fini en saucisse vendue à la sauvette à la sortie des Abattoirs.
A New Montpellier, la musique d'un violon est comparable à celle d'un flingue, et le Violonier avait l'un et l'autre à portée de son étui.
Ce soir-là, le Violonier fut tiré de ses rêveries musicales par un mordillement. Il ouvrit un œil, puis l'autre, puis posa son instrument². Un rat gigantesque, bavant, plus agressif que les autres, essayait de manger l'humain étendu sans défense. Il avait été maîtrisé par ses congénères plus raisonnables qui savaient d'où viendrait la prochaine ration de nourriture garantie sans poison. Le musicien chantonna deux ou trois mesures pour apaiser la petite brute, puis lui caressa le haut de la tête, entre les oreilles. Elle couina. Le musicien avait appris depuis longtemps le langage des rongeurs, mais celui-ci venait de toute évidence d'un endroit lointain et s'exprimait avec un accent difficile à déchiffrer.
"IIIIK iik iik IIIKK gnip gnip IIK ik iiik !- Pardon ? Un scientifique fou t'as injecté une toxine qui a réorganisé ton AD et a attisé ton instinct violent tout en décuplant ton intelligence ? Tu l'as surpris dans ses plans d'essais sur des moutons ? C'est lui la cause des hurlements des dernières nuits, et des cadavres de prostituées qu'on a retrouvées atrocement mordues par des petites dents acérées ?
- Iiiik !
- Non, je suis désolé, c'est pas vraiment une affaire pour moi. C'est plutôt à la police de s'en occuper, et je préférerais jouer avec le diable encore une fois qu'aller voir ces fumiers pour leur offrir des informations. Qu'ils se débrouillent, avec leur technologie..."

A ce moment précis, la ville explosa.

² Oui, il pouvait jouer en dormant. C'est un tour qu'il avait appris d'un maître indien : le truc, c'est de pas vraiment dormir, mais de rester en permanence à la lisière de la conscience, ce qui permet de jouer sa propre berceuse.

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